Bâtiments et logements individuels : le chauffage au gaz, c’est fini ?

En novembre 2020, le ministère de la transition écologique a annoncé, avec la nouvelle réglementation environnementale, un objectif de réduction de 30% des besoins énergétiques des habitations et de leur émission de CO2. 

En précisant l’interdiction dès l’été 2021 du chauffage au gaz dans les maisons individuelles neuves, et progressivement dans les logements collectifs. 

 Cela impacte évidemment notre métier en tant qu’administrateurs de biens, car il ne faut pas attendre les prochains coups de massue pour nous poser les bonnes questions lorsque nous allons engager des travaux pour nos clients. Et nous voici confrontés à un arbitrage entre confort, écologie et économie. 

Ce que nous ont appris 25 années d’expérience sur la gestion du chauffage collectif 

 Nous avons pu observer dans debâtiments aux spécificités diverses de nombreux cas de figure. Nous avons pu en tirer un certain nombre de conclusions : 

  • Le chauffage collectif au gaz est le moins cher de tous et moins polluant que le chauffage au fioul. Les performances des chaudières à gaz sont devenues très bonnes, pour un coût d’exploitation optimal. 
  • La qualité de chauffage et le confort qui en découlent sont encore très supérieurs à l’électrique, mais des innovations efficaces tendent à réduire cette différence. 
  • La gestion collective du chauffage est complexe et rarement satisfaisante : manque de réactivité à la mise en route et l’arrêt en fonction de la météo, difficulté de personnaliser la diffusion du chauffage en fonction des souhaits de chacun. 

Le réchauffement climatique a des conséquences fondamentales sur la gestion du chauffage 

La France s’est engagée dans une forte baisse des consommations d’énergie fossile pour atteindre la neutralité carbone d’ici 2050. Cela implique que nous divisions par deux les émissions de CO2 d’ici 2030. 

La RE2020 présentée par Barbara Pompili en novembre va dans ce sens : en maison individuelle, le seuil maximal d’émissions sera de 4kgCO2/m2/an. Un seuil qui « exclura de fait des systèmes utilisant exclusivement du gaz », dit le Ministère. En logements collectifs, la transition sera progressive, mais dans le même objectif de sortir partiellement ou totalement le gaz non renouvelable, à terme.  

Donc la seule solution au niveau du chauffage est d’électrifier au maximum tout ce qui est chauffage ou chauffage de l’eau, car le nucléaire et les énergies renouvelables ne produisent pas de CO2. Et c’est sans compter sur une éventuelle incitation fiscale qui ne manquera pas d’accompagner ces mesures. Incitation ou punition ! 

Chauffage et attractivité des logements, à la location et à la vente 

 

Dans la mise en location d’un bien ou dans sa mise en vente, le diagnostic de performance énergétique n’est plus considéré comme une simple démarche administrative. Cela devient un véritable élément utile pour l’évaluation.

Il faut déjà considérer qu’un appartement qui serait en catégorie F ou G sera considéré comme indécent et ne pourra donc plus être loué. Sans aller jusqu’à ces extrêmes, de plus en plus de personnes ne veulent plus vivre dans des appartements qui sont des passoires énergétiques ou qui ont des consommations d’énergie fossile. A l’inverse, une performance particulièrement bonne permettra d’augmenter le prix de la location ou de la vente.  

Le mode de chauffage et l’isolation vont donc être déterminants sur l’attractivité du bien, et il conviendrait d’intégrer cette donnée dans une vision de long terme lorsqu’on gère des biens. Pour la location, les bailleurs ne pourront pas bénéficier de beaucoup d’avantages à l’optimisation énergétique, mais ils verront leurs biens mieux valorisés et leurs locataires plus fidèles. De ce côté-là, les propriétaires de résidences principales et les copropriétaires auront plus de chance, avec MaPrimRenov, dispositif renforcé en octobre 2020. 

 Tous ces éléments vont contraindre les propriétaires comme les intervenants de toute la chaîne du bâtiment à revoir leur façon d’envisager les travaux. La transition énergétique va mettre fin à certaines installations, pénaliser certains bâtiments et favoriser de nouveaux types de gestion et d’équipement pour nos appartements et nos immeubles. 

Changer la façon d’envisager les travaux quand nous sommes syndic

En copropriété, nous avions l’habitude d’optimiser la production de chaleur par le changement des chaudières et l’optimisation de la distribution. Ces travaux s’ajoutent souvent à d’autres du type isolation des toituresdes garages ou ravalement des façades. 

Désormais, pour les copropriétés, il faudra grouper les travaux pour pouvoir obtenir une subvention, soumise à une économie de 35% des consommations énergétiquesSur le papier, ces subventions sont intéressantes. Mais il va falloir les engager rapidement et de manière coordonnéedans un concept d’éco-rénovationce qui sera sans doute difficile à faire accepter à certains copropriétaires. 

Faudra-t-il envisager de changer nos chaudières gaz par des pompes à chaleur électriques ? C’est un sujet qui méritera d’être étudié de façon approfondie quand cela sera possible. Le triptyque investissement / économie / valeur du bien doit être soigneusement calculé. N’oublions pas que gagner une lettre sur un DPE permet en théorie de majorer le prix de vente d’un appartement ou d’une maison !  

Changer de chauffage ou changer d’habitudes ? 

Toutes ces mesures semblent aller dans le bon sens du point de vue environnemental. Mais il faut rester très attentif à ce qu’il n’y ait pas d’effet rebond.  

Je cite souvent l’exemple d’un immeuble dont la façade nord était froide et dont les occupants se plaignaient d’une température d’à peine 19°C qu’ils parvenaient à atteindre en chauffant au maximum. De gros travaux d’isolation et d’optimisation du chauffage ont été entrepris, afin de résoudre le problème. Un million d’euros ont été investis

Or contre toute attente les consommations de chauffage n’ont pas baissé ! En effet, les occupants ont préféré faire le choix de profiter de cette meilleure performance pour chauffer leur logement à 23°C, et parfois plus, privilégiant leur confort à l’économie d’énergie. 

Ce sera donc surtout par le changement des habitudes individuelles que nous ferons baisser la pollution collective de nos appartements et de nos immeublesL’électrification des chauffages et l’individualisation de la gestion permettra peut-être une meilleure responsabilisation.

Alors puisque le gaz est mort, vive l’électricité ! 

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