Logements à Marseille : entre indécence et indignité...
- Mes conseils pour investir en immobilier à Marseille
- 25 février 2019 | Stéphane Pujol
Je participe depuis quelques semaines à un projet citoyen sur le bâti de nos immeubles. Dans le cadre de ce groupe informel, j’ai été chargé d’expliquer les différences entre les notions d’indécence, d’insalubrité, d’indignité et donner le cadre légal.
Cet article reprend le compte rendu que j’ai fait à ce groupe.
C’est complexe…
Définir les notions de vétusté, d’indécence, d’insalubrité, d’hygiène et de sécurité est complexe, car ces notions se chevauchent. En fait ce qui les distingue véritablement est le cadre légal.
Vétusté, indécence est le cadre privé : Aucun appartement ne doit être loué lorsqu’il est indécent. Tout propriétaire ou agence qui loue un appartement indécent se place en dehors de la loi.
Insalubrité, hygiène et sécurité sont le cadre public : cela relève de l’administration au sens large pour protéger la sécurité et la santé.
Ne parlons pas des marchands de sommeil qui ne font volontairement aucun entretien, sous des prétextes bidon, car ils ne méritent que la prison et la ruine. Ils sont à ce jour montrés du doigt, mais continuent.
Le cadre de l’entretien des bâtiments est complexe avec un enchevêtrement des notions et si aucun acteur ne fait vivre ces notions, si aucun acteur ne détecte les soucis, les situations peuvent durer.
Les notions de droit, de politique, de morale se mélangent. Même pour moi qui pratique la gestion des immeubles, je croyais que ces notions étaient claires alors qu’elles m’ont demandé un effort pour les préciser.
Rappel des règles et du cadre et du droit
J’ai eu besoin de poser le cadre pour fixer les idées, car un appartement décent peut devenir insalubre faut d’entretien du locataire
Absence d’entretien et de nettoyage : droit privé
Chaque occupant a cette obligation, que vous soyez propriétaire ou locataire. Elle est parfois oubliée. C’est pourtant le premier niveau des obligations et des droits qui s’il n’est pas respecté peut conduire à mettre en danger la santé des occupants et des voisins.
Réparations locatives : droit privé
Le locataire doit faire les petits travaux d’entretien. Cela est défini par Décret n°87-713 du 26 août 1987. Ce sont les petits réglages, les changements d’ampoule, les fluides, le changement de douilles et d’interrupteurs, etc.
Réparations incombant au propriétaire : droit privé
Toutes les réparations, améliorations sont à la charge du propriétaire. C’est également lui qui décide du niveau de confort de l’appartement…
L’indécence d’un logement : droit privé
La loi Solidarité et Renouvellement Urbain (SRU) du 13 décembre 2000 précise que tout bailleur, qu’il soit privé ou public, est tenu de délivrer à son locataire un logement décent. La définition du logement décent est précise, depuis un décret d’application du 30 janvier 2002.
Un logement n’est pas décent si :
– La sécurité des occupants n’est pas assurée : électricité, gaz, amiante plomb
– La santé n’est pas préservée : étanchéité à l’air et à l’eau
– Les équipements ne sont pas fournis : coin cuisine, eau chaude, chauffage ou installation permettant le chauffage
Exemple : ventilation insuffisante, toiture non étanche, pièce principale inférieure à 9 m2
La qualification d’indécence, faite par le locataire ou l’association qui l’accompagne reste à l’appréciation subjective du juge (la jurisprudence) pour ce qui est des mesures à prendre.
Problème d’hygiène et de sécurité de l’habitat : action publique/droit administratif
Le logement doit respecter les prescriptions du Règlement sanitaire départemental (RSD).
Le Règlement sanitaire départemental (RSD) constitue un document de références pour lutter contre les nuisances et pollutions et permettre aux autorités administratives (souvent le maire), d’intervenir pour prévenir ou résorber les risques sanitaires qu’elles constatent localement.
Ce sont des décrets en Conseil d’Etat qui fixent ou doivent fixer les règles générales d’hygiène et toutes autres mesures propres à préserver la santé de l’homme dans les champs couverts par le RSD. Il s’agit notamment :
· de la prévention des maladies transmissibles ;
· de la salubrité des habitations, des agglomérations et de tous les milieux de vie de l’homme ;
· de l’alimentation en eau destinée à la consommation humaine ;
· de l’exercice d’activités non soumises à la législation sur les installations classées pour la protection de l’environnement ;
· de l’évacuation, du traitement, de l’élimination et de l’utilisation des eaux usées et des déchets ;
· de la lutte contre les bruits de voisinage et la pollution atmosphérique d’origine domestique ;
· de la préparation, de la distribution, du transport et de la conservation des denrées alimentaires.
Le maire peut faire une injonction ou prendre un arrêté de mise en demeure. En cas d’inexécution des travaux, il peut dresser une contravention de 3e classe (amende de 450 €).
De manière concrète, ils interviennent pour les cafards, les rongeurs, les puces donc des soucis de propreté et probablement en amont sur des soucis collectifs plus engageants.
Le péril : action publique/droit administratif
Là c’est trop tard et l’immeuble a subi des dommages suite à des négligences, de l’absence d’entretien ou de défaut de construction. Il y a danger pour les occupants.
2 types de périls :
– le péril imminent : évacuation des occupants et travaux à réaliser
– le péril non imminent avec travaux à réaliser sous des délais et avec des conditions
Le péril est décidé par le maire. Il me semble que tout le monde connaît cette notion et qu’elle n’a pas besoin d’être plus développée.
Le logement insalubre : action publique/droit administratif
Un logement insalubre est un logement qui présente un danger mettant en jeu la santé ou la sécurité de l’occupant. C’est la notion la plus grave. Un logement indécent revêt un caractère moins urgent : il s’agit d’un logement trop petit et/ou n’offrant pas certains éléments de confort basique.
Un logement/immeuble insalubre vacant ou non est un logement/immeuble qui présente un danger pour la santé des locataires ou/et du voisinage. Les deux principaux facteurs d’insalubrité sont : un bâti et/ou un équipement dégradé (humidité, risques d’incendie, chauffage défectueux avec risque d’intoxication au monoxyde de carbone, etc.)
L’insalubrité résulte d’un désordre grave ou d’un cumul de désordres.
Il existe deux types d’insalubrité : l’insalubrité remédiable : des mesures peuvent être prises afin de remédier à l’insalubrité ;
l’insalubrité irrémédiable : il n’existe aucun moyen technique d’y mettre fin ou les travaux nécessaires à sa résorption sont plus coûteux que la reconstruction.
Exemples
- Mauvaise qualité ou dégradation des structures du bâtiment (fondations, murs, planchers), défauts d’étanchéité ou d’isolation.
- Risque d’incendie, équipements électriques et/ou gaz dangereux.
- Présence de plomb, d’amiante.
- Infractions multiples au RSD.
La qualification d’insalubrité repose sur une évaluation appuyée sur une grille qui comprend tous les éléments de l’immeuble et du logement et peut donner lieu à une « cotation » combinant de nombreux critères, mais qui laisse néanmoins une part de subjectivité puisqu’il s’agit d’une appréciation. Ainsi, un logement peut être qualifié de « simplement » indécent par un inspecteur de salubrité, alors qu’avec la même grille de cotation, une association conclura à l’insalubrité ! Sachant qu’un logement qualifié d’insalubre ou menaçant ruine (sous arrêté) est évidemment indécent …
Le logement indigne : politique devenu action publique/droit administratif
La loi de « mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion » du 25/03/2009, en donne pour la première fois une définition légale : « Constituent un habitat indigne les locaux utilisés aux fins d’habitation et impropres par nature à cet usage, ainsi que les logements dont l’état, ou celui du bâtiment dans lequel ils sont situés, expose les occupants à des risques manifestes pouvant porter atteinte à leur sécurité physique ou à leur santé. »
Sur le plan du droit, le traitement de ces situations relève des pouvoirs de police administrative exercés par les maires et les préfets, dans le cadre de procédures spécifiques.
L’habitat indigne, d’abord concept politique devenu une notion juridique, recouvre l’ensemble des situations d’habitat qui sont un déni au droit au logement et portent atteinte à la dignité humaine.
Ainsi, la notion d’habitat indigne englobe notamment :
· les logements, immeubles et locaux insalubres et impropres à l’habitation (risque pour la santé)
· les logements et immeubles où le plomb est accessible (risque de saturnisme)
· les immeubles menaçants de ruine, en péril (risque d’insécurité)
Notre action
Nous ne pouvons intervenir sur le droit ou la législation ou la sous-responsabilité avec laquelle les services publics/administratifs gèrent ou ont géré ces problèmes.
Nous ne pouvons donc intervenir et aider que sur la notion d’indécence qui renvoie à une grande variété de situations, parmi lesquelles certaines relèvent d’une réalité identique à celle de l’insalubrité, ou du péril.
J’espère que cette note éclairera chacun.
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