Copropriété : vote de travaux de renovation de façade avec changement des gardes-corps : article 24 ou 25 ?

La rénovation d’une façade avec en prime le changement des garde-corps est un moment difficile tant pour les propriétaires que pour le syndic car il est engageant d’un point de vue financier, mais aussi d’un point de vue esthétique et juridique.
L’esthétique d’une façade est un bien commun et doit être interprétée avec précaution pour ne pas être regrettée voir contestée judiciairement.

En tant que syndic, nous avons eu cette contestation et nous souhaitions vous partager le jugement qui a été rendu dans cette procédure car il est intéressant et donne une interprétation intelligente de la loi. 

La contestation émanait de plusieurs copropriétaires qui remettaient en question les résolutions prises lors d’une assemblée générale votée en 2021.
Ces résolutions concernaient le remplacement des garde-corps des balcons, travaux jugés nécessaires par le syndicat en raison de la vétusté et de la dangerosité des installations existantes.

Les contestataires reprochaient l’usage de l’article 24 et du vote à la majorité des présents pour des travaux qui, selon eux, portaient amélioration et auraient dû être votés à la majorité de l’article 25 soit à la majorité absolue.

Le projet était de remplacer les anciens garde-corps acier barreaudés par des garde-corps en aluminium et plaques de plexiglas.

Les contestataires arguaient que le remplacement des garde-corps ne se faisait pas à l’identique, tant sur le plan visuel qu’au niveau des matériaux, et constituait donc une amélioration pour la copropriété devant être soumise au vote favorable de la majorité absolue de l’article 25 de la loi de 1965.

Quelle a été la décision du tribunal sur les modalités de vote de ces travaux?

Le tribunal a donné raison à la copropriété dans cette affaire sur le vote en article 24 à la majorité des présents. La nécessité du remplacement des garde-corps étant justifiée par leur état de vétusté et de dangerosité, l’amélioration devenant donc l’accessoire des travaux.

Extrait du jugement :
“Il est constant que la décision de remise en état ou de remplacement d’un élément d’équipement commun relève de l’article 24. En outre, des travaux imposés par la vétusté ou l’usure restent des travaux de réparation ou d’entretien même s’il y a objectivement amélioration par substitution d’installations plus modernes, fiables et performantes ou adjonction d’éléments nouveaux. En effet, la loi n’impose aucunement un remplacement à l’identique. Dès lors, si les travaux emportent transformation, amélioration ou addition sans que la preuve de la vétusté de l’équipement ne soit rapportée, ils dépassent le cadre d’une simple opération d’entretien et doivent être votés à la majorité de l’article 25.”

Ainsi, il a fallu démontrer que le remplacement des garde-corps tenait bien de leur état très dégradé, la preuve pesant sur le syndicat des copropriétaires.

Extrait du jugement :
“L’ensemble des éléments précités établit de façon évidente et incontestable la vétusté et l’usure avancée des garde-corps, leur potentielle insécurité et la volonté des copropriétaires de procéder à leur remplacement intégral dès l’année 2019. Ces travaux apparaissent donc nécessaires à la conservation de l’immeuble ainsi qu’à la préservation de la sécurité physique des occupants.

[…] Dès lors, nonobstant la modification de l’aspect des garde-corps et des matériaux utilisés, les travaux de remplacement non identiques, bien que coûteux, de ces éléments usés et vétustes restent bien des travaux de conservation et d’entretien devant être votés à la majorité de l’article 24, le changement de l’aspect visuel des garde-corps n’étant pas l’élément essentiel du marché.”

 

Deux points précis ont pesé sur la décision du juge : 

  • La preuve de l’état des balcons, avec production d’un compte rendu d’entreprise, d’un diagnostic d’architecte, d’un rapport de bureau de contrôle qui ont tous alerté sur l’état des garde-corps
  • L’information des copropriétaires sur toutes les décisions prises successivement dans ce dossier lors des assemblées générales ou des comptes rendus de visites des différents corps d’état

 

Nous nous sommes réjouis de cette décision mais malheureusement, la procédure ayant été interminable, nous avons dû intervenir en urgence sur les garde-corps pour leur renforcement ce qui a engendré des coûts supplémentaires de l’ordre de 250 000€ dont la majorité des copropriétaires auraient bien voulu se passer.

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